Le battement d’aile d’un papillon

6 juin 2018

La fin des classes ! Le branle-bas du mois de juin est commencé et avec lui, le lavage des pupitres, des bureaux de classe. S’ajoute souvent le ménage des étagères. On jette, on tasse et on se dit : on verra l’année prochaine !

Et le mois d’août arrive et on commence déjà à penser à notre classe, à ce qu’on veut mettre en place cette année  : un coin lecture, un coin repos, un coin ordinateurs, un coin nature, etc. Et on commence à faire des plans d’aménagement dans notre tête et même sur papier !

Il arrive qu’on se dise : « Je vais envoyer le classeur à gauche en avant, déplacer la bibliothèque vers le fond de la classe à droite. » Ou encore : « Je vais peindre la bibliothèque et l’étagère en rouge et je vais peindre aussi le mur derrière jaune soleil ! Et tant qu’à y être, je vais laver les vitres, et… et… et… ! »

Tout ça part toujours de très bonnes intentions : créer de la nouveauté, bien accueillir les nouveaux élèves, essayer une nouvelle façon de faire. On veut partir l’année du bon pied dans un environnement à notre goût. On planifie alors deux jours de travail à l’école, avant même la rentrée officielle.

On déplace le classeur, on change de place l’étagère, on déplace les ordinateurs, on donne un coup de pinceau, on lave les vitres, on passe un coup de balai, on nettoie les tableaux. Bref, on prépare sa classe avant le brouhaha des premiers jours. On pense même que ça fera une classe de moins à préparer pour le concierge. Ou encore, que le peintre n’aura pas à se déplacer pour un petit bout de mur !

Or, tous ces petits gestes, qu’on croyait sans conséquence, peuvent pourtant avoir un effet pervers. Ce bénévolat a un impact bien concret sur le travail des collègues au soutien, tout particulièrement.

Parce qu’on fait alors le travail des concierges, des peintres, des techniciens en informatique, pour ne nommer que ceux-ci, qui sont payés pour faire ces tâches. Imaginons un peu si tous les enseignants faisaient de même… Beaucoup de nos collègues perdraient leur travail.

Imaginons également que des parents choisissent nos manuels, préparent notre liste d’effets scolaires et nous imposent de préparer nos cahiers d’exercices… Ou qu’ils décident, par gentillesse, de placer notre classe à leur goût ! Ou pire encore, qu’ils nous imposent une pédagogie !

Vous n’êtes pas convaincus ? Et si on nous retranchait une journée par semaine pour permettre à une fondation ou à un organisme sans but lucratif de travailler avec nos élèves sur un projet X. Une semaine de travail à 80 %, payée à 80 %… Notre portefeuille et notre régime de pension s’en ressentiraient !

Vous m’avez vue venir avec mes gros bras, mon pot de peinture et ma serpillère  ! Sans mauvaises pensées, en agissant ainsi, on retire des tâches qui auraient dû être exécutées par du personnel de soutien. On justifie donc des coupures d’heures de travail à des femmes et des hommes dont c’est le gagne-pain.

Certains diront que le concierge n’a pas le temps de tout faire avant la rentrée de toute façon et que le peintre doit faire quatre autres classes avant de pouvoir s’attaquer à la leur. Vrai, mais c’est précisément parce que des heures leur ont été coupées au fil des ans. Le nombre de pieds carrés à entretenir a augmenté, mais le temps pour le faire a diminué.

Allons plutôt voir notre patron pour lui demander que le personnel de soutien ait les heures suffisantes ou qu’il y ait de l’embauche afin de permettre que tout soit fin prêt pour la rentrée scolaire.
On dit que le battement d’aile d’un papillon peut avoir des conséquences surprenantes, faisons donc en sorte qu’elles soient positives !