6 octobre 2016
Le débat ne date pas d’hier!
La création d’un ordre professionnel enseignant refait régulièrement surface dans l’actualité et le débat sur cette question ne date donc pas d’hier.
En 1997, le Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec (CPIQ) s’adresse à l’Office des professions du Québec en vue de la constitution d’un ordre professionnel enseignant. Puis, en 2000, la Fédération des comités de parents du Québec emboite le pas en donnant son appui à un tel projet.
De ces initiatives découlera une consultation en janvier 2002, au beau milieu de la négociation pour l’équité salariale. Un certain François Legault était alors ministre de l’Éducation… !
À chaque occasion, les promoteurs de l’ordre professionnel invoquent essentiellement les mêmes motifs : la protection du public, la protection de la clientèle, l’assurance d’une meilleure reconnaissance sociale et légale de la profession enseignante et la responsabilité de chaque enseignante et enseignant quant à sa pratique.
Champlain, au front
Le Syndicat de Champlain a été très actif dans le dossier de l’ordre professionnel au début des années 2000, comme en témoignent les nombreux articles dans nos publications de cette époque.
En avril 2002, le XXIXe Congrès du Syndicat adopte à l’unanimité une résolution pour la tenue d’un référendum sur l’instauration d’un ordre professionnel.
S’ensuit une importante tournée d’information dans les établissements aux termes de laquelle les membres ont pu exprimer, lors d’un scrutin secret, leur opinion sur le sujet.
Le 22 mai 2002, la réponse des enseignantes et enseignants de Champlain est claire : 92,5 % se prononcent contre l’ordre ! À noter que le taux de participation est de 72,3 %.
L’ordre a la couenne dure !
Au mois de décembre suivant, l’Office des professions du Québec publiera son avis. D’une part, l’Office reconnaît que la protection du public est largement assurée par la Loi sur l’instruction publique.
D’autre part, l’Office reconnaît le rôle des administrateurs scolaires et des conseils d’établissements, des programmes pédagogiques, de même que l’encadrement de l’accès à la profession et la sanction des écarts. Pour toutes ces raisons, l’Office conclut qu’un ordre professionnel n’a pas lieu d’être.
Pourtant, au mois de juillet, soit à peine quelques mois après ce dépôt qui a fait grand bruit, Pierre Reid, alors
ministre de l’Éducation dans le gouvernement libéral, annonce son intention de mettre sur pied un ordre professionnel enseignant.
Anticipant sans doute l’initiative du ministère, la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) adopte, en juin 2003, une position très ferme contre l’instauration d’un tel ordre.
En 2004, c’est au tour de la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ) de tenir un référendum à l’échelle du Québec sur l’instauration d’un ordre professionnel. 94,7 % des 54 000 répondants s’y opposent !
Depuis, l’idée d’un ordre professionnel refait régulièrement surface, particulièrement lorsqu’il est question de rebrasser les structures en éducation.
La Coalition Avenir Québec l’a inscrit dans son programme et la proposition est maintenant reprise par le gouvernement libéral de Philippe Couillard. Elle figure dans les propositions en vue des consultations publiques sur la réussite éducative cet automne.
L’avis de l’Office était pourtant clair…
Dans son avis étoffé déposé en décembre 2002, la réponse de l’Office des professions du Québec était pourtant claire : c’est non !
Si l’Office juge, dans son rapport, que l’enseignement est assimilable à une profession, il ajoute que « dans les cir-
constances, et misant sur la capacité du système d’éducation de se doter des mécanismes appropriés, l’Office ne juge pas opportun de recommander la création d’un ordre professionnel des enseignants et enseignantes. »
L’Office stipule aussi que l’État veille déjà efficacement à garantir l’encadrement approprié pour assurer la protection adéquate du public via des mécanismes de contrôle de la compétence et de l’intégrité, dès l’entrée et durant tout l’exercice comme enseignant (contrôle de la qualification, normes d’exercice et de déontologie, évaluation des pratiques, régime disciplinaire).
L’Office propose plutôt des aménagements dans le système d’éducation, inspirés du système professionnel, dont certains ont d’ailleurs été mis en place, notamment quant à l’émission et la révocation du brevet d’enseignement. L’instauration de la vérification des antécédents judiciaires, effective depuis 2005, découle également de l’avis de l’Office, tout comme la nomination dans chaque commission scolaire, depuis 2009, d’un Protecteur de l’élève, responsable du traitement des plaintes provenant des parents et des élèves.