La mixité sociale et scolaire : un enjeu actuel

31 octobre 2018

« D’un côté, nous trouvons des élèves motivés par le développement de leurs champs d’intérêt, des parents satisfaits, des enseignants passionnés et des écoles de plus en plus dynamiques. De l’autre côté, nous trouvons des élèves exclus, des classes ordinaires où les élèves en difficulté sont surreprésentés, des enseignants avec des charges inégales et lourdes et des écoles en concurrence pour les meilleurs élèves. Que faire devant une telle situation ? »

Le sujet vous interpelle ? C’était le programme de la conférence de consensus en éducation qui portait sur la mixité sociale et scolaire, organisée par le centre de transfert pour la réussite éducative du Québec (CTREQ), qui s’est tenue, les 9 et 10 octobre derniers, à Montréal. L’objectif était de mobiliser des acteurs du terrain et de la recherche, de créer un lieu de discussions et de réflexions et d’établir les zones de convergence et de divergence, pour ensuite formuler des recommandations.

Pourquoi en parler dans ces lignes ? Parce que des membres du Syndicat de Champlain y ont assisté et parce que la composition de la classe, les projets pédagogiques particuliers, l’école privée et l’intégration des élèves HDAA, pour ne nommer que ceux-là, concernent aussi l’ensemble de nos milieux.

Le Champlain a donc discuté avec trois des membres qui ont assisté à la conférence pour prendre le pouls de leur expérience et savoir ce qui les a interpellés.

« Dans mon milieu, la clientèle est majoritairement issue des communautés culturelles, précise d’emblée Patrick Jasmin, enseignant au secondaire à Longueuil. Dans une des présentations, il était question de ségrégation. Évidemment, notre réalité n’est pas comparable à certains milieux aux États-Unis, mais il faut se le dire, il y a quand même des gens qui donnent une autre adresse pour ne pas aller à telle ou telle école. Les gens recherchent l’homogénéité et se tournent donc vers le privé. Il y a quelque chose là qui m’interpelle beaucoup parce que, dans mon milieu, l’effet de ségrégation est accentué par la compétition due à la forte présence du privé. Milieu favorisé versus milieu défavorisé, cette dualité a un impact sur notre système parce que les gens qui ont les moyens font le choix d’aller au privé. »

Marie-Ève Dumouchel est enseignante au secondaire à Salaberry- de-Valleyfield. « Maintenant, je me sens mieux outillée pour parler des effets positifs de la mixité socio-économique et scolaire. Bref, des effets positifs d’une composition de classe balancée », indique-t-elle en rappelant que son école se trouve dans un milieu plus défavorisé.

« Chez nous, la présence multiculturelle n’est pas vraiment un enjeu, pas plus que celle de l’écrémage des écoles privées. Par contre, ces sujets abordés m’amènent à voir tout autrement la sélection des élèves et à avoir une réflexion très concrète sur nos programmes.

« S’il y a une chose que je retiens, c’est que les études ont démontré clairement que dans une classe bien composée et équilibrée, représentative de son milieu également, la présence des élèves forts a un impact positif important sur la réussite des plus faibles. Et, contrairement à ce qu’on entend très souvent, cette mixité n’a pas vraiment d’impact négatif sur les élèves forts. Tout le monde y gagne en fait. »

Marie-Claude Lauzon est enseignante au secondaire à Boucherville, un milieu favorisé où l’écrémage par le privé et les nombreux projets particuliers sont des réalités bien présentes.

« À partir du moment où l’éducation est devenu un droit et non un privilège, on veut nécessairement le meilleur et c’est normal. Mais c’est complètement inverse à la démocratisation de l’éducation, principe directeur du Rapport Parent. On n’est plus dans l’égalité des chances, on est dans le clientélisme, soutient-elle.

« Globalement, je vois bien les effets de mes classes en sport-études, constituées de l’élite des élèves, sur mes classes qui n’ont d’ailleurs plus rien d’« ordinaire » justement. Et pourquoi pas des projets particuliers avec des groupes balancés ? Il me semble que ces projets pourraient profiter à bien des jeunes, en dépit de leurs difficultés. »

Curieux ? Vous trouverez plus d’informations à conference.ctreq.qc.ca